The Challenge « Histoires de temps » - L’Armée des 12 singes – Terry Gilliam
Date de sortie du film : 1996
Avec : Bruce Willis, Madeleine Stowe, Christopher Plummer, Brad Pitt
Nous sommes en l'an 2035. Les quelques milliers d'habitants qui restent sur notre planète sont contraints de vivre sous terre. La surface du globe est devenue inhabitable à la suite d'un virus ayant décimé 99% de la population. Les survivants mettent tous leurs espoirs dans un voyage à travers le temps pour découvrir les causes de la catastrophe et la prévenir. C'est James Cole, hanté depuis des années par une image incompréhensible, qui est désigné pour cette mission.
Je re rappelle ami lecteur, que tu peux m'envoyer ton avis sur le film par mail -CulturoVoraces@gmx.fr ou participer dans les commentaires. Ce serait chouette. Si tu as toi-même un blog/site et que tu as publié ton avis chez toi, laisse-moi le lien que je puisse te mettre dans la récap. Merci.
Les avis
Eerylin :
Par la maîtrise de son scénario et de sa réalisation, l'interprétation baroque et déjantée des acteurs principaux (Bruce Willis, Bard Pitt), "L'armée des douze singes" est un "must see" et je ne peux que le recommander, maintenant j'avoue que je déteste la désespérance or cette plongée dans un monde futuriste et dystopique met tristement en scène une humanité moribonde, parquée sous terre comme des cloportes à cause d'un virus.
Son contenu est trop sombre pour que je puisse réellement aimer ce film, par contre il m'a vraiment impressionnée ; par son titre d'abord, mélange de terme de guerre, de chiffre emblématique et d'animalité en référence à l'humain (une des images fortes est celle de ces hommes enfermés sous terre comme l'étaient avant eux, les singes victimes d'expériences), mais également par la maîtrise de son scénario et de sa réalisation, l'interprétation magistrale des acteurs principaux (Bruce Willis, Brad Pitt) et par la BO qui entrechoque un tango tragique et passionné avec le What a wonderful life de Louis Armstrong (qui prend là une teinte très ironique).
Le thème du voyage dans le temps, sujet de notre challenge ^^ y est abordé de façon traditionnelle, je pense que dans ce film, il existe plusieurs lignes de temps, on le comprend lors de cette fameuse scène finale qui se déroule sous les yeux du petit James (et dont il se souviendra toute sa vie) ou encore tout au long du film grâce aux répliques des personnages :
James : - C'est exactement ce qui nous arrive. Comme le passé, le film ne change pas. Il ne peut pas changer, mais Á chaque vision, il paraît différent parce qu'on est différent. On voit dautres choses. "
ou encore
James : - Je ne tavais pas reconnue.
Kathryn : - Tu as pas mal changé, toi aussi.
James : - Ça a toujours été toi. Dans mon rêve, cétait toi.
Kathryn : - Je me rappelle de toi comme ça.
James : - Cest vrai ?
Kahryn : - Il me semblait te connaître. Il me semble tavoir toujours connu.
James : - Jai peur !
Sachant cela, sont-ils quand même condamnés à répéter encore et encore les mêmes actions où y a t-il un espoir ? Dans quel but le voyage dans le temps est-il utilisé véritablement par les scientifiques, est-ce pour empêcher le virus de se propager ou au contraire pour contrôler l'évènement qui finira par les mener au pouvoir ?
Maîtrisent-ils réellement le voyage dans le temps ou ne sont-ils que des pantins et James le seul à pouvoir (en se souvenant des événements) agir pour infléchir la destinée tragique qui se joue encore et encore ? C'est une autre force de ce film, nous amener à extrapoler les significations et les conclusions ^^
AlterVorace
Alors que la chaîne américaine Syfy semble décidé à la création d'une série dérivée de l'Armée des douze singes -projet qualifié de « ridicule » par le réalisateur du film Terry Gilliam-, je me suis dit que ce serait une bonne idée d'inclure l’œuvre dans le Challenge « Histoires de temps ».
Pour écrire cet article, j'ai donc revu L'Armée des douze singes. Alors qu'à l'origine j'avais un peu peur d'écrire cet avis, je me rends compte que j'ai beaucoup, beaucoup de choses à dire. Je vais donc essayer de structurer un peu tout ça... Et c'est pas gagné.
En premier lieu, je vais donner mon avis sur le film comme je le fais habituellement -points forts/ponts faibles, blablablabla-. Ensuite je parlerai du thème du voyage dans le temps, vu que c'est avant tout ce qui nous intéresse dans le challenge.
La première fois que j'ai vu L'Armée des douze singes, j'avoue que j'avais plus ou moins posé mon esprit critique au vestiaire, à la fois j'avais genre quatorze ans. Il faut dire que la construction du récit -voyages entre plusieurs époques, rêve du héros...- demande d'être un minimum attentif. Je m'étais donc laissée transporter par le film sans me poser trop de question. En finalité, j'avoue avoir beaucoup apprécié l’œuvre de Terry Giliam sans pour autant avoir un avis structuré sur le pourquoi du comment j'avais aimé.
Cette fois, parce que je me souvenais très bien du scénario, j'ai pris le temps de savourer tout ça. Donc de tenter de déstructurer un peu le fonctionnement du film et « d'analyser » ce que j'ai pu ressentir et penser pendant le visionnage. Ou plus simplement, ben j'ai pris des notes -wouhaou-.
Le thème qui m'a le plus intéressée -et fascinée- dans L’Armée des douze singes est sans contexte celui de la mémoire. James Cole, notre héros, ne cesse de faire le même rêve. Enfant, il se trouve dans un aéroport et assiste à une scène violente. Tout au long du film, la scène se modifie. A se demander quelle part de ce «souvenir » est réelle et quelle influence a le présent sur la reconstitution de ce dernier. Ce qui semble prévaloir sur la réalité, c'est la perception qu'en ont les personnages, consciemment ou non.
Au départ le héros est envoyé en 1990. Devant les psychiatres -dont Kathryn Railly-, Cole explique qu'il vient du futur, qu'il n'est pas fou mais qu'il est ici pour trouver des informations sur le virus qui a décimé la population en 1997. Bien entendu, personne ne le croit. A ce moment là les données sont plutôt simples. Puis Cole retourne dans le futur. Après un autre voyage raté -il se retrouve propulsé dans la premier guerre mondiale- il parvient enfin à retrouver Kathryn Railly et la kidnappe. Là aussi, les choses sont claires, Cole vient du futur et sorte de Cassandre de l'apocalypse, personne ne veut l'entendre. La psychiatre n'a de cesse de persuader son ravisseur qu'il est malade. Encore une fois, Cole retourne en 2035. Cette fois, sa vision bascule et il pense effectivement être atteint de troubles mentaux. On le renvoie dans le passé alors que Kathryn est enfin persuadée que Cole a dit la vérité sur le virus et l'implication de l'Armée des douze singes. Et là, dans les arguments que développe le héros « oui je suis fou mais je vais guérir », on voit à quel point tout est justifié. Ce qui compte à ce moment du récit, c'est où le spectateur place finalement sa confiance. Les deux thèses semblent se défendre et deux réalités sont possibles. Dans la première, nous sommes bien dans un récit de science-fiction. Le voyage dans le temps est l'argument premier du scénario et Cole est juste en train de rencontrer des difficultés à gérer ces multiples excursions dans le passé. Dans la seconde réalité possible, ce sont les troubles mentaux qui sont au centre du récit. Cole est malade : il croit ou a cru dans la réalité de ce monde de 2035 et en sa mission. L'obstacle ici n'étant plus les effets du voyage dans le temps sur son équilibre mais le traumatisme du docteur Kathryn Railly. On pourrait avancer l'idée qu'elle souffre du syndrome de Stockholm et n'a comme choix, pour rendre le kidnapping et sa propre fragilité supportable, que de penser que Cole a dit la vérité. Bref, plus qu'une histoire de temps et de virus, L'Armée des douze singes pourrait être le récit de la mémoire et des troubles qu'engendre la fragilité et la subjectivité de nos souvenirs, de notre perceptions de la réalité.
A côté de cet aspect -ô combien passionnant-, le film a de nombreuses qualités. La première d'entre elles est sans doute les prestations du trio d'acteurs qui campe les premiers rôles. Bruce Willis -James Cole- nous offre quelque jolis moments et Madeleine Stowe -trop souvent sous-employée dans sa carrière- nous prouve son talent. Le travail de Brad Pitt est sans doute celui qui marque le plus le téléspectateur, il faut dire qu'à l'époque on venait juste de découvrir qu'il était un comédien de valeur avec ses prestations dans Entretien avec un vampire et Seven. Dans L'Armée des douze singe, sa prestation correspond tout à fait à l'univers de Terry Gilliam. Clapclapclap.
Une autre chose m'a frappée dans le film : la musique. J'ai trouvé la BO tout à fait approprié à l'ambiance du film. Le morceau avec l’accordéon est assez chouette. Enfin, la chanson du générique de fin « What a wonderful world », mythique, est un choix vraiment intelligent.
Bref, beaucoup de choses biens dans le film de Terry Gilliam. Mais pas que... Ben nan, tu sais comme je suis difficile...
L’Armée des douze singes est donc une œuvre de Terry Gilliam, à qui l'on doit -entre autres- Brazil ou Las Vegas Parano. Ce que certains encensent chez le réalisateur est la même chose que ce que lui reprochent ses détracteurs. Je ne suis pas une inconditionnelle du cinéma de Gilliam même si j'apprécie certaines de ses œuvres. Pour ce qui est de celle qui nous intéresse ici, j'ai tendance à trouver certains de ses discours un peu lourds et démonstratifs. La présence des sujets de la manipulation médiatique, du poids de la technologie, du déclin de la communication manque franchement de subtilité. La question de la normalité est intéressante mais se noie un peu dans la réalisation de Gilliam. Cadrages volontairement bancals, gros plans à foison, décors un peu poussifs, on retrouve bien le style de l'ancien des Monty Python. Bref, on aime ou pas et moi j'ai un peu de mal. Le goût des mises en abyme -avec entre autres Sueurs froides d'Alfred Hitchcock- et de la complexité sert néanmoins le propos et a sans doute contribué à faire de l'Armée des douze singes un film qui a marqué l'histoire de la science-fiction. N'empêche que la symbolique et les fils conducteurs m'ont plusieurs fois fait lever les yeux au ciel. Particulièrement, la présence des singes tout au long du film -aussi subtil que l'est Poule Prout, c'est dire- (le film "Monnaie de singe" à l’hôpital ou encore le lien avec Le Magicien d'Oz).
Reste que L'Armée des douze singes est un film intéressant qui résiste bien à plusieurs visionnages et au temps qui passe. Une œuvre à voir au moins une fois.
Passons maintenant au thème qui nous intéresse dans le cadre de notre challenge « Histoires de temps »... Vu que c'est le premier article de la thématique, je ne peux pas comparer le traitement du voyage dans le temps dans d'autres œuvres. Mais je vais quand même essayer de m'intéresser de plus près à la vision que nous offre le film de Gilliam. Je suppose que pour ceux qui ont vu le film, ils auront vu la même chose que moi -n'hésite pas à le dire dans les commentaires, d'accord ou pas- : le récit forme une boucle. Le début qui annonce la fin qui rappelle le début. Un cercle. Bref, le voyage dans le temps engendre une boucle et le héros semble se battre contre des moulins à vents. Rien ne peut être empêché dans le destin de James Cole. Premièrement on peut se demander si le film adhère réellement à une vision circulaire/cyclique du temps. Ce point du vu nous faisant plus penser à celui des cultures asiatiques qu'occidentales -avec le temps comme quelque chose de plus ou moins linéaire-.
Si le voyage dans le temps est un élément qui existe déjà depuis longtemps dans la littérature, les questions que posent le thème ont changé. Ce qui compte ce n'est plus la technologie en elle-même, celle qui permet de retourner dans le passé, mais bien les paradoxes qui en découlent. Ainsi, les œuvres qui proposent l'idée que toute action a des conséquences incontrôlables sont nombreuses -L'Effet papillon par exemple-... Sauf que d'une certaine façon, Terry Gilliam s'en éloigne. Il semble que Cole subisse son destin sans pouvoir y changer quoique ce soit.
La question des conséquences des voyages sur l'équilibre mental de James Cole est l'aspect central dans L'Armée des douze singes. Les scientifiques eux-même, en cherchant un « volontaire » mentalement fort, s'attendent à ce que les voyages mettent en péril l'équilibre des envoyés. Alors que la science-fiction a souvent abordé les conséquences des modifications du passé -donc sur le destin des personnages et de notre civilisation-, Terry Gilliam, lui, regarde les conséquences non pas sur les fait mais sur le psychisme et les souvenirs de ses personnages.
Reste à savoir de quelle manière les thèmes du temps, des voyages dans le passé et futurs ou encore la conséquences de ces derniers seront traités dans les œuvres que nous liront ou verront au sein du challenge. Personnellement, j'ai hâte de pouvoir faire le lien entre livres, films et même nanars.
N'hésite à envoyer ton avis sur le film -CulturoVoraces@gmx.fr- ou à le laisser dans les commentaires. Si tu publie ta critique sur ton propre blog ou espace perso et que tu ne veux pas qu''il paraisse ici, laisse-nous le lien pour qu'on puisse le relayer. Merci.
Prochain rendez-vous le 27 novembre avec La machine à explorer le temps de H. G. Wells.